Angoisse collective en cours

Par Isabelle Houde
5 Octobre 2020, Québec
Je souhaite d’abord vous dire que je comprends.  Je comprends que certains puissent avoir peur.  Peur pour ceux que vous aimez et qui sont plus vulnérables.  Peur pour votre entreprise, votre emploi ou votre situation financière.  Peur pour votre propre santé aussi.  Même la peur de propager, sans le savoir, LE virus est justifiable.  Je vous assure que je comprends vos inquiétudes et je les respecte avec beaucoup d’empathie.  Je comprends mais, de mon côté, cela ne fait pas partie de ce qui me tracasse.  Ce sont d’autres inquiétudes qui m’habitent.
Plus j’observe ce qui se passe autour de moi, dans les réseaux sociaux et dans les médias, plus j’appréhende de voir une population entière devenir anxieuse et absorbée par une situation qui est, à mon humble avis, bien mal gérée.  Croyez-moi, je sais ce que l’anxiété peut faire à une personne, je n’ose pas imaginer sur toute une société.  Je crains qu’on se laisse guider par cet insidieux sentiment pour aboutir à des actes beaucoup plus nocifs.  J’ai l’impression qu’on priorise ici la santé physique aux dépends de la santé psychologique et morale.  Il y a un bon moment que je me questionne sur la cohérence dans les mesures adoptées, mais très honnêtement, je ne la cherche plus pour éviter d’attiser en moi une aberration déjà à fleur de peau.
On va se le dire, c’est rendu du grand n’importe quoi.  Dès le départ, on nous a « tenus en haleine » en nous promettant une deuxième vague.  La première n’était même pas terminée qu’il fallait déjà qu’on stresse pour la prochaine.  Cependant, on nous a donné l’été sans trop de contraintes, histoire que chacun puisse faire le plein d’énergie, de soleil et de contacts humains.  Attendons donc l’automne pour donner la deuxième claque.  Laissons-les oublier à moitié avant de les ramener à la case départ en même temps que le changement de saison.  L’automne, moment de l’année où la luminosité diminue grandement, où notre corps doit se réajuster à ce manque et à la fraîcheur qui s’installe.  C’est ma saison préférée mais, physiologiquement, elle est plus difficile puis nous rend moins tolérants et plus moroses.  Quel magnifique moment pour cette deuxième vague qui nous frappe de plein fouet!  C’était pourtant à prévoir.  Malgré tout, on va se plier aux exigences et accepter les nouvelles restrictions.  Pourquoi?  Simplement parce que nous sommes blasés, nous en avons marre, nous avons juste hâte d’en être libérés.  Je constate que plusieurs trouvent les mesures impertinentes, mais on va le faire, peu importe nos opinions réelles.  On va le faire pour avoir la paix, c’est tout.
Malheureusement, je vois les gens se pointer du doigt et chercher les coupables à cette  deuxième vague qui nous restreint, une fois de plus.  Voyons donc!  A-t-on vraiment besoin d’accuser quelqu’un?  Va-t-on flageoler les gens pour avoir osé s’accorder une certaine vie sociale?   Va-t-on reprocher à quelqu’un d’avoir revu sa famille?  Va-t-on accuser les grands-parents et leurs petits-enfants d’avoir passé des moments précieux ensemble?  Va-t-on dénoncer une personne souffrant de solitude ou vivant des moments de détresse psychologique d’avoir saisi l’opportunité pour prendre un verre entre amis?  Va-t-on dénigrer sur la place publique tous ceux qui ont manqué de prudence?  Vraiment?  On est rendus là?  On va évacuer notre colère et notre anxiété sur les autres?  D’ailleurs, qui est irréprochable?  Ce retour à un semblant de vie normale cet été nous a été permis à ce que je sache.
Les conséquences sur la santé mentale collective seront désastreuses si nous n’en prenons pas soin.  Suffit d’être un peu attentif à autrui pour le comprendre.  Cette fâcheuse tendance à nous accuser entre nous et se juger n’aidera en rien.  J’ai maintenant décidé de regarder la situation différemment, avec une meilleure considération pour les besoins psychologiques et sociaux des autres.  C’est pourquoi je ne suis pas à la recherche d’un coupable.  Je ne sais pas nécessairement ce que vit une personne et ce dont elle a besoin pour garder le moral, la force de s’accrocher ou la capacité de gérer ses émotions et dilemmes intérieurs.  Il se peut que ce soit de voir des gens qui apaise cette personne.  La santé mentale m’importe parce que je sais qu’elle peut faire des ravages lorsqu’elle n’est pas écoutée.  Selon moi, cela peut devenir aussi dévastateur qu’un virus et entraîner tout autant de victimes collatérales.  Ne la banalisons pas.  Si cette pandémie affecte notre moral à tous, imaginons ce qu’elle peut faire vivre à certains.
S’il m’arrivait qu’une personne que j’aime souffre intérieurement et que la prendre dans mes bras s’avère un réconfort plus puissant que mon écoute derrière un écran, je suis franchement désolée si je vous déçois, mais je choisis de la réconforter avec un immense câlin, si c’est ce dont elle a besoin.  Si, de mon côté, j’arrive à comprendre vos inquiétudes, j’espère que vous comprendrez mon choix.

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